Bon, en fait, non, ce jeu ne se termine pas réellement, mais j'ai fini l'intrigue principale.
Tout d'abord, précisons que je ne suis pas du tout fan de ce genre de jeu, abusivement appelés jeux de rôle, où on n'est pas libre de jouer un rôle comme on veut et où le seul point commun avec
les jeux de rôle sur table et que son personnage devient plus fort à mesure qu'on joue.
Skyrim est le cinquième épisode de la série The Elder Scroll. J'ai découvert cette série avec le 3ème épisode, Morrowind, auquel j'avais joué quelques heures : après la déception de m'apercevoir
que tous les elfs avaient une tête de sauterelle, je n'avais pas digéré que ma première mission de grand rebelle sauveur du monde soit d'aller tuer des rats pour devenir plus fort.
Plus récemment, j'ai joué à Mass Effect (les deux premiers épisodes) et j'ai trouvé que des progrès avaient été faits et qu'on offrait enfin au joueur la possibilité de choisir (un peu) comment
il voulait jouer son rôle. Influencé par Day9 qui avait l'air de beaucoup s'amuser en jouant à Skyrim, j'ai craqué et acheté le jeu (sot que je suis, je n'ai pensé à
le pirater qu'après l'avoir acheté, heureusement que je l'ai eu en promotion).
La première chose qui impressionne dans Skyrim est la taille du monde (enfin, du pays) à explorer. On est ébloui par les splendides paysages montagneux qu'il faut traverser pour se rendre d'un
village à un autre. Fort heureusement, il est possible de rendre instantanément à l'entrée d'un endroit déjà visité car il faut bien avouer que courir dans la nature n'est guère palpitant une
fois qu'on s'est fait aux jolis décors. La sensation de liberté est d'ailleurs de courte durée. En effet, la carte est certes très jolie mais très peu lisible, et si on ne suit pas les routes, on
finira par rencontrer une montagne infranchissable là où la carte ne semblait indiquer qu'une simple colline. En effet, bien que le jeu se déroule dans un pays montagneux, le sauveur du monde est
incapable de s'aider de ses mains pour grimper une pente un peu trop forte. Cela donne lieu à bien des situations ridicules. Notons la présence d'un sort indispensable qui indique le chemin à
suivre pour atteindre l'objectif sélectionné. Le jour où un bug a fait cesser de fonctionner ce sort, mon plaisir de jeu a largement diminué car je déteste me perdre : si la carte du pays est peu
lisible, les cartes des donjons et villages sont tout simplement illisibles.
Parlons maintenant du scénario. Il tient en quelques mots : un ancien ennemi est revenu et vous êtes le seul à pouvoir l'empêcher de détruire le monde. Tiens, c'est marrant, c'est exactement le
même scénario que Mass Effect. Mais la comparaison s'arrête là :
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Skyrim
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Mass Effect
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Passé du personnage
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Aucun. On ne sait pas d'où il vient ni comment il est arrivé là. Il va se faire couper la tête pour un crime dont on ne sait rien, pas même s'il en est innocent.
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Avant de commencer le jeu, le joueur choisit un certain nombre d'éléments sur l'enfance et le début de carrière de son personnage.
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Promotion et solitude dans la mission
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Le personnage est une sorte d'élu dont rien ne prévoyait l'arrivée. C'est son destin à lui de sauver le monde, point.
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Les circonstances politiques poussent les supérieurs du personnage à agir en discrétion et le personnage est choisi parce qu'il est le meilleur choix dans les circonstances que les
scénaristes ont créées.
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Motivation
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LOOT !
À moins qu'on ne soit obligé de sauver le pays parce que les développeurs ont mis des murs invisibles aux frontières et qu'on ne peut pas s'échapper ?
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Le personnage obéit aux ordres de ses supérieurs. Le joueur peut aussi chercher à gagner en grade.
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Notons que dans Skyrim, si le joueur n'est motivé que par le gain (argent, titres), il ne doit pas perdre son temps à sauver le monde, cela ne rapporte que très peu. D'ailleurs, si on décide de
croire les trois gus qui nous poussent à se dépêcher de sauver le monde, le jeu est assez court. Si on flâne, on finit par s'apercevoir que le monde n'est pas vraiment en danger.
Le pays est divisé par une guerre civile à laquelle le joueur peut participer, dans un camp ou un autre (et probablement même les deux). Des informations politiques sont disséminées de ci de là,
mais il est impossible d'en faire le moindre usage. En fait, l'équipe de développement n'a tout simplement pas eu les moyens de suivre l'équipe de scénaristes. Ainsi, j'ai découvert la preuve
qu'une troisième faction manipulait les rebelles, mais je n'ai pas eu le droit de les prévenir (aucune option de dialogue en ce sens). Il est frustrant de voir des gens s'entre-tuer, de savoir
comment les arrêter, mais de ne pas pouvoir le faire parce que le jeu ne le prévoit pas. De la même manière, les différents arcs narratifs optionnels (de qualité variable) sont totalement
indépendants du reste du jeu et n'ont aucune répercussion. Par exemple, après être devenu le chef de l'école des mages, j'y ai gagné une robe, mais aucun pouvoir, ni privilège : les mages sous
mes ordres continuent à me demander d'aller chercher leur alambic perdu et lorsqu'un passant me propose de m'inscrire à l'école des mage, je n'ai même pas le droit de répondre "J'en suis le chef,
ducon !" ou simplement "C'est déjà fait."...
Ce manque de cohésion entre les éléments du jeu gache complètement la sensation de réaliser quelque chose. Le personnage devient certes plus fort et plus riche, mais à la fin il ressemble à un
vieux sénile qui collectionne des objets pour se souvenir et tenter de convaincre les gens qu'il a fait des choses dans sa jeunesse. De là, l'intérêt de réaliser des choses diminue et on finit
par se convaincre qu'on est vraiment fait pour aller porter les courses de la mamie du coin à qui fifille en échange de quelques pièces d'or.
Certaines missions demandent de choisir qui croire entre deux personnages. Il est souvent impossible de savoir qui a raison, et on peut les laisser en plan, ils attendront jusqu'à la fin du
monde. Il est d'ailleurs impossible de supprimer une mission de sa liste, ce qui est assez agaçant quand on s'est récupéré un truc du genre "Tuer un enfant et manger son coeur pour devenir un
démon" et qu'on n'a pas envie de le faire.
L'immersion dans le jeu finit d'être totalement plombée par la mise en scène pitoyable. Là où Bioware avait payé un doubleur et une doubleuse pour jouer tous les textes du personnage principal
dans Mass Effect, Bethesda a décidé de faire des économies en coupant au montage tous les moments où le personnage du joueur prend la parole. De plus, les dialogues sont joués dans la même vue
que le joueur utilisait juste avant (vue subjective ou vue à la 3ème personne). Quasiment aucun effort de mise en scène n'a été fait. La vue à la 3ème personne étant tout simplement injouable, on
ne voit donc jamais son personnage. Cela n'aurait pas été si grave en l'absence des autres remarques, mais dans ce cas, cela coupe le dernier lien que le joueur pourrait avoir avec son
personnage. On en vient à de demander à quoi cela sert de prendre son temps pour créer un personnage jusque dans les moindres traits de son visage, puisqu'on ne revoit jamais ce visage plus tard,
à moins de volontairement tourner la caméra pour admirer sa création qu'on vient d'asseoir sur un banc.
La catastrophe ne s'arrête pas là. Alors qu'un réel effort a été fait pour rendre les villages vivants (les personnages travaillent, vont boire un coup à l'auberge, puis vont dormir, les enfants
jouent dans les rues...), les interactions avec les personnages que l'on rencontre sont pitoyables. Les répliques se comptent sur les doigts de la main, certains personnages posent des questions
ou font des propositions auxquelles le jeu ne permet pas de répondre. Le nombre de doubleurs (pas doués (j'ai joué en version anglaise)) est si petit qu'on se demande souvent si on a déjà croisé
un personnage ou s'il a juste la même voix qu'un autre. Un bon nombre de personnages proposent d'aller chercher un objet qu'ils ont perdu dans une grotte infestée de monstres qu'ils ont visitée à
un moment miraculeux où il n'y avait pas de monstres. Cela doit probablement représenter 50% du jeu. Heureusement, le jeu est très grand. Notons aussi qu'il est impossible de discuter avec un
personnage traumatisé : à la moindre erreur de clic, on est susceptible de voler ou de frapper un villageois qui va alors rameuter la garde sans qu'il soit possible de lui dire "Pardon, je ne
l'ai pas fait exprès, tiens prends 100 pièces d'or et on est quittes.".
Concernant les compagnons, Skyrim est assez limité. On peut recruter une personne pour nous suivre, et parfois une seconde qui suivra le temps d'une mission. Les compagnons sont des imbéciles qui
se jettent sur les ennemis et meurent d'une boule de feu dans le dos, lancée par le joueur un instant plus tôt. La seule conversation qu'ils ont se résume à "Look, a cave, I wonder what's inside
!" 10 secondes après que le jeu a affiché en gros au milieu de l'écran "LOST LIMBS CAVE", ou bien encore "I have a bad feeling about this" lorsqu'on arrive dans une pièce où il est évident que 10
monstres vont nous tomber dessus. Malgré tout, avoir un compagnon est agréable et on se sent moins seul dans certains donjons oppressants, de plus ils peuvent porter des trésors lorsque le
personnage principal a les poches pleines. Du coup, j'ai triché et rendu mon compagnon immortel. Au début du jeu, il tuait les monstres avant moi, à la fin du jeu, il leur grattait les oreilles.
La promotion du jeu avait lourdement insisté sur la présence de gros dragons contre lesquels on pourrait se battre. Le personnage du joueur est censé être l'élu, le seul humanoïde à pouvoir tuer
des dragons. Dans les faits, 4 brigands y arrivent tout aussi bien, mais eux, ils n'ont pas de supers effets spéciaux à la fin, et toc ! Ces sales bêtes se promènent un peu partout, et surtout là
où ça fait chier le joueur. En effet, une fois un dragon en vue, le jeu lance l'unique musique de baston du jeu (4 mesures stressantes et soûlantes jouées en boucle) et désactive la possibilité
de se déplacer instantanément à un endroit déjà visité. Il faut alors soit courir très loin en espérant que le dragon ne suivra pas, soit le tuer. Or les dragons adorent se planquer derrière le
sommet d'une montagne, il faudra donc courir longtemps pour les débusquer. Cela est d'autant plus difficile qu'ils volent et que le personnage ne sait pas escalader. Vient ensuite le problème de
la distance : un dragon dans le ciel vole plus vite qu'une boule de feu ou qu'une flèche. Il faudra donc attendre 1/4h que monsieur veuille bien atterrir (pour peu qu'il existe un endroit assez
grand et dégagé aux alentours) pour aller lui foutre une craquette. Lorsqu'un dragon apparaît dans un village, on préférera le laisser tuer deux ou trois gardes plutôt que prendre le risque d'en
égratigner un avec une boule de feu et de se retrouver en prison. Une fois que le dragon s'est posé et a pris sa rouste, les villageois viennent tous s'émerveiller de la puissance du héros qui
n'a pas forcément fait grand chose mais a de beaux effets spéciaux. Deux minutes plus tard, ils ne savent plus qui vous êtes.
Le jeu est bourré de bugs. Je n'ai pas pu terminer plusieurs missions, soit parce qu'un événement automatique n'a pas été déclenché, ou alors parce que j'avais déjà visité la zone avant qu'on ne
me demande de le faire. J'ai des objets dans mon inventaire que je suis censé avoir rendu à leur propriétaire et que je ne peux pas jeter car ils sont essentiels à des mission déjà terminées, ce
qui m'empêche de transporter des objets lourds et je me suis déjà retrouvé enfoncé dans le sol jusqu'au nez. L'IHM date des années 90 et un clic un peu trop rapide peut avoir des conséquences
gênantes (vente d'un objet précieux que le marchand vous repropose immédiatement à 10 fois le prix de vente, prise de position pour la mauvaise faction...).
Heureusement, lorsque les développeurs n'ont pas le temps de terminer un jeu, ils offrent à la communauté la possibilité de le faire à leur place ! De nombreux mods permettent de modifier
l'interface, corriger des bugs, supprimer la texture des culottes des personnages féminins, compléter les listes de choix incomplètes (comme par exemple pour créer des diadèmes à la forge),
etc.
Au final, malgré une réalisation assez honteuse, ce jeu vaut tout de même le coup, pas pour son histoire banale, pas pour son système de jeu sans originalité, pas pour son ambiance ratée, mais
simplement pour son pouvoir de tuage de temps. Pour 30€ (en promo sur Steam), j'aurai de quoi occuper une demi-heure de temps à autre pendant des mois en allant nettoyer un donjon. Et ce n'est
pas plus mal ainsi, comme ça la prochaine fois que j'achèterai un jeu, je pourrai un choisir un de qualité, même s'il est court !